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Le traitement de la maladie cancéreuse passe désormais par un suivi continu du patient à distance

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Masterclass MSD du 1er décembre 2022

A l’heure du bouleversement des parcours patients, une masterclass MSD s’est interrogée sur le sujet le 1er décembre 2022 : considérer l’optimisation du parcours de soins à travers trois points de vue, celui de l’oncologue, celui du pharmacien hospitalier et celui de l’industriel.

En présence d’une trentaine de participants. Fabrice Denis, oncologue à l’ILC Jean Bernard au Mans et président de l’Institut national de la e-santé (INeS), Catherine Rioufol, chef de service Pharmacie du Groupement hospitalier sud des Hospices civils de Lyon (HCL), responsable du dispositif Oncoral, et Carmen Landin, responsable Parcours de santé, Direction de la stratégie hospitalière et des territoires de santé de MSD étaient invités à mettre en avant leur expertise.

Fabrice Denis a d’abord démontré les apports de la télésurveillance (TLS) dans les parcours, alors que l’ESMO (European Society for Medical Oncology) a publié en avril dernier ses premières recommandations en la matière autour des Patient-reported outcomes measures (PROMs) qui permettent une optimisation de leur suivi pendant et après les traitements. “On travaille depuis des années afin de savoir pourquoi l’évolution des cancers s’avère imprévisible à long terme, explicite-t-il. Et l’on a observé que ce n’est pas le suivi de la tumeur, mais le suivi du patient qui est le plus efficace pour appréhender le développement de la maladie.” D’où l’idée de donner le rôle principal au patient via des outils numériques pour faire remonter des e-PROMs, tandis que des algorithmes déclenchent les alertes permettant à l’équipe soignante d’intervenir dès les premiers symptômes alarmants.

Télésurveillance et e-PROMs bientôt systématiques

A partir d’une douleur, d’un essoufflement ou encore de troubles du langage…, des examens peuvent être prescrits avec anticipation de complications, adaptation des soins ou de la dose-intensité, proposition de soins de support adaptés, etc. Plus de 4000 patients ont ainsi fait l’objet d’études randomisées ces dernières années sur la télésurveillance (TLS). “Globalement, la TLS en cancérologie améliore la qualité de vie et, dans quelques études, la survie globale. Elle réduit le taux d’hospitalisation aux urgences, notamment pour toxicité, améliore la dose-intensité des traitements et le contrôle des symptômes”, énumère Fabrice Denis. C’est pourquoi des forfaits sont d’ores et déjà prévus pour financer les (ré)organisations afférentes.

La stratégie décennale de l’INCa publiée début 2021 préconise en effet de proposer à tous les patients d’être équipés d’un dispositif de TLS reconnu par la Haute autorité de Santé. Et l’ESMO a créé en 2021 un groupe de travail pour définir quelle application choisir pour quels cas. Fabrice Denis incite aussi à utiliser l’outil d’évaluation de la e-santé disponible sur le site de l’INeS, qui donne un score aux appli et logiciels à partir de 25 questions. Ce score permet même de mesurer la probabilité de remboursement de la solution digitale. Enfin, une évaluation médico-économique sur le sujet sera réalisée par l’INCa à partir de 2023, qui mènera aussi, l’an prochain, une évaluation en vie réelle à grande échelle (tous cancers). La question du remboursement de ces applications doit être abordée, de même que la mise en place d’actes qui permettront de financer les organisations et parcours mis en place par les établissements hospitaliers pour mettre ces outils digitaux à la disposition des patients.

Anticancéreux oraux : 33 mois pour généraliser télésuivi et pharmacie clinique

Catherine Rioufol a mis de son côté l’accent sur l’expérimentation article 51 Oncolink (suivi de l’observance, des effets indésirables et des interactions médicamenteuses liés aux anticancéreux oraux), largement inspirée du parcours Oncoral initié dès 2014 aux HCL. Oncoral fait intervenir l’infirmière et le pharmacien aux côtés de l’oncologue en lien avec les acteurs libéraux. A la clé, l’élaboration pour le patient d’un plan de prise de ses médicaments (personnalisé en fonction de son rythme de vie) et des retours d’expériences patients via des PROMs. Le programme a déjà été évalué positivement via la plateforme de vraie vie Pacome (Patient Cancer Oral MEdication) avec des travaux de recherche afférents à la clé, note Catherine Rioufol. “C’est la reproductibilité de ce type de parcours qui est étudiée aujourd’hui via l’expérimentation article 51 pilotée par Unicancer (45 établissements, 15000 patients visés), avec une entrée dans le droit commun attendue au bout de 33 mois.” L’accent y est mis sur la coordination, avec des forfaits adaptés aux interventions de chaque acteur et différents selon les trois séquences successives du parcours : primo prescription hospitalière et premier cycle de traitement (initiation du traitement, mise en lien des offreurs de soins), suivi proximal (suivi coordonné ville-hôpital du patient et partage des informations de prise en charge) puis suivi distal par les acteurs libéraux avec recours possible à l’équipe hospitalière.

L’enjeu : sécuriser les traitements ambulatoires et se rapprocher en vie réelle des résultats d’efficacité et de tolérance des essais cliniques. Ceci est d‘autant plus important que les effets indésirables restent la première cause de non-observance. “Or celle-ci concerne un patient ambulatoire sur trois en cancérologie selon la littérature et ces patients sont difficiles à identifier”, souligne-t-elle.

Ici aussi, les applis se développent pour améliorer la gestion des symptômes et des interactions médicamenteuses. La Société Française de Pharmacie Oncologique met aussi à disposition OncoThériaque®, la base de données de référence sur les anticancéreux, et les fiches Oncolien® d’informations sur les traitements oraux. Surtout, cette situation plaide pour une intégration de la pharmacie clinique dans des parcours qui sont tout sauf linéaires, avec de nombreux facteurs de risque à la clé, rappelle Catherine Rioufol. Au plan médico-économique, les premières évaluations montrent une efficience économique positive de deux à quatre euros d’économie pour chaque euro investi en temps pharmacien dans les hôpitaux de jour (HDJ) en cancérologie, a-t-elle conclu.

L’industriel en co-construction de solutions adaptées en HDJ

Enfin, Carmen Landin, responsable parcours de santé chez MSD aura mis en avant le point de vue de l’industriel, décidé à accompagner les HDJ en oncologie : 30 projets accompagnés dans 26 établissements à fin 2022, avec un questionnement des pratiques et une co-construction de solutions adaptées. “Car nous sommes conscients que les innovations thérapeutiques peuvent avoir un impact organisationnel, d’où la création d’une équipe dédiée pour aider les établissements à faire face aux enjeux organisationnels liés à l’immunothérapie en termes d’augmentation de file active, de coordination ou encore d’adaptation aux nouveaux besoins des patients. Pour cela nous nous engageons aux côtés des professionnels de santé sur des projets de deux ans permettant de définir et de suivre les plans d’optimisation spécifiques à chaque établissement avec l’objectif final de favoriser une augmentation des taux de rotation, avec une réduction des temps d’attente à la clé, et d’améliorer l’expérience patient”, argumente-t-elle.

François Silvan


Liens :

https://ines-france.fr/

https://www.oncotheriaque.org/extranet/login

https://oncolien.sfpo.com/