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Benjamin Valentin, pharmacien clinicien – assistant spécialiste au CHU de Lille : “La valeur ajoutée de l’intégration au PMSI d’une cotation de pharmacie clinique

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Le CHU de Lille a été pionnier dans la cotation des actes de pharmacie clinique, effective depuis 2020 et qui a déjà fait l’objet d’une publication. Surtout, cette nouvelle nomenclature a été implémentée dans le logiciel PMSI et de recueil d’activité, avec de gros enjeux à la clé, explique Benjamin Valentin, pharmacien clinicien en orthopédie-traumatologie septique et référent de la pharmacie clinique pour le département d’information médicale (DIM).

Comment avez-vous été amenés à intégrer une nomenclature de pharmacie clinique “avant l’heure” ?

Nous sommes 19 pharmaciens cliniciens au CHU, répartis dans différents services. Au moment de réaliser nos bilans annuels, chacun reprenait les chiffres de son activité, souvent tracée dans des tableurs Excel. En 2019, nous nous sommes posé la question d’automatiser ce bilan d’activité pour gagner du temps. Nous avons alors pris contact avec le DIM, estimant que le plus simple serait que nos actes, déjà tracés dans le dossier patient, puissent être tracés comme les autres professionnels de santé dans le logiciel PMSI de l’établissement (Cora, Maincare), qui permet de recueillir des activités hors champ strict du PMSI. Cela nécessitait certains prérequis, et tout d’abord d’harmoniser nos actes. J’ai donc repris le lexique de la Société française de pharmacie clinique (SFPC) pour y associer une cotation. Au niveau du DIM, c’est le Dr Laueriere avec M. Delaby qui s’est chargé de la création d’une nomenclature locale des actes de pharmacie clinique, au format de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). Chaque pharmacien clinicien s’est vu ouvrir des droits d’accès et de codage dans l’outil métier PMSI. Un profil utilisateur spécifique “pharmacien clinicien” a été créé et ajouté à la matrice des habilitations d’accès aux logiciels PMSI. Ce, en cohérence avec les droits d’accès existants des pharmaciens au dossier patient validés par la commission confidentialité de l’information médicale du CHU. Chaque code est composé de deux parties : un pour définir un acte pharmaceutique, “L_PHARM”, et un pour définir l’acte. Par exemple, “L PHAR L_CON 1” pour la conciliation médicamenteuse d’entrée. Cette nomenclature est étoffée tous les six mois si des confrères se lancent dans de nouveaux types d’actes ou si le lexique de la SFPC évolue.

Quelle en est la plus-value au quotidien ?

Il existe une interface entre le logiciel d’aide à la prescription et le logiciel PMSI permettant une traçabilité au fil de l’eau de notre activité de façon efficiente. Le pharmacien peut ainsi coter son acte une fois la traçabilité faite dans le dossier patient. Ce système nous a permis d’abandonner quasiment tous nos tableurs de suivi d’activité. Il s’agit d’un système sécurisé validé par la commission de confidentialité de l’établissement. Nous disposons sur nos profils de requêtes permettant de suivre notre activité et de réaliser notre bilan d’activité en une extraction.

L’intégration d’une telle nomenclature est-elle possible dans tout type d’établissement de santé ?

Il existe une condition, c’est que le logiciel du PMSI le permette ! La création ensuite d’une nomenclature interne peut se faire en s’inspirant notamment du travail de l’Omédit PACA-Corse (voir l’interview de Stéphane Honoré , PU-PH de pharmacie clinique à l’AP-HM et responsable de l’Omédit PACA-Corse) en collaboration avec la SFPC afin d’avoir une harmonisation de cette codification. Nous avons publié le travail que nous avons effectué au CHU de Lille afin de décrire les différentes démarches ayant amené à cette nomenclature ainsi que son intégration dans le logiciel PMSI, pour que d’autres établissements puissent s’en inspirer.

Elle n’a pas d’impact financier pour l’instant ?

Les codes ” L_PHARM” créés dans le logiciel PMSI sont des codes locaux. S’ils sont structurés comme de réels codes NGAP, ils ne sont ni opposables, ni facturables à l’assurance-maladie. Ces codes locaux ne remontent donc, ni dans le système de facturation de l’établissement, ni dans les bases PMSI. Toutefois, si les actes de pharmacie clinique devaient un jour intégrer la liste des actes et des prestations pris en charge par l’assurance-maladie, nous serions prêts.

Cela étant, si l’activité de pharmacie clinique n’est pas facturable à l’assurance-maladie, elle a une incidence sur les recettes des établissements en médecine ambulatoire depuis l’instruction gradation de 2020 : l’intervention de pharmacie clinique peut être comptabilisée dans les interventions permettant de justifier la facturation de GHS de médecine ambulatoire. L’intégration de nos actes au logiciel PMSI simplifie la réalisation du bilan économique de notre activité clinique sur les parcours ambulatoires. L’impact potentiel de cette cotation à travers cette instruction ministérielle fait d’ailleurs l’objet de la seconde partie de notre publication.

Propos recueillis par François Silvan


Pour aller plus loin :

Valentin B et al. Ann Pharm Fr. 2023 Jan; 81(1): 115-22
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S000345092200089X

INSTRUCTION N° DGOS/R1/DSS/1A/2020/52 du 10 septembre 2020 relative à la gradation des prises en charge ambulatoires réalisées au sein des établissements de santé ayant des activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie ou ayant une activité d’hospitalisation à domicile.
https://www.lespmsi.com/DGOS_instruction_gradation_10092020.pdf