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Les données de santé : un atout pour les patients et les professionnels de santé


La collecte et l’exploitation des données de santé représentent d’immenses enjeux et espoirs dans le domaine de la santé. Les données de santé sont au cœur de nombreux débats en raison de leur statut de données sensibles. En effet, si les données de santé sont un atout pour les patients et les professionnels de santé, elles posent un certain nombre de problématiques technologiques, humaines et éthiques. Découvrez les différentes facettes des données de santé, des données prometteuses pour la médecine de demain.

Données de santé : quelle définition ?

Qu’est-ce qu’une donnée de santé ? 

Une donnée de santé(1) est une donnée relative à la santé physique ou mentale, passée, présente ou future, d’une personne physique (y compris la prestation de services de soins de santé) qui révèle des informations sur l’état de santé de cette personne.

Le Règlement européen sur la protection des données personnelles ou RGPD donne une définition large des données de santé.

Cette définition de notion de données de santé comprend notamment :

  • Les informations relatives à une personne physique collectées lors de son inscription en vue de bénéficier de services de soins de santé ou lors de la prestation de ces services ;
  • Les informations obtenues lors du test ou de l’examen d’une partie du corps ou d’une substance corporelle, y compris à partir des données génétiques et d’échantillons biologiques ;
  • Les informations concernant une maladie, un handicap, un risque de maladie, les antécédents médicaux, un traitement clinique (chirurgie) ou l’état physiologique ou biomédical de la personne concernée.

CNIL : les trois catégories de données personnelles de santé 

Trois catégories de données à caractère personnel concernant la santé entrent dans cette définition : 

  1. Les données de santé par nature : antécédents médicaux, maladies, prestations de soins réalisés, résultats d’examens, traitements, handicap, etc.
  2. Les données qui, croisées avec d’autres données, deviennent des données de santé en ce qu’elles permettent de tirer une conclusion sur l’état de santé ou le risque pour la santé d’une personne : croisement d’une mesure de poids avec d’autres données (nombre de pas, mesure des apports caloriques…), croisement de la pression artérielle avec la mesure de l’effort, etc.
  3. Les données qui deviennent des données de santé en raison de leur destination, c’est-à-dire de l’utilisation qui en est faite au plan médical. 

La bonne réponse est : A

L’information sur le taux d’invalidité contenue dans un traitement est une donnée de santé si ce taux révèle que la personne est atteinte d’un handicap.1 Le NIR n’est pas une donnée de santé, y compris lorsque celui-ci est utilisé comme identifiant national de santé. 1 Enfin, l’aptitude à l’exercice d’une activité sportive n’est pas en soi une donnée de santé. Néanmoins, si elle est associée ou croisée à d’autres informations (par exemple les circonstances de délivrance du certificat), elle est considérée comme étant une donnée de santé. En revanche, l’inaptitude à l’exercice d’une activité sportive est une donnée de santé.1

Qu’est-ce qui n’est pas une donnée de santé ?

Les données à partir desquelles aucune information sur l’état de santé d’une personne ne peut être obtenue ou déduite n’entrent pas dans la notion de données de santé.

Ainsi, on ne considère pas qu’une application qui collecte un nombre de pas au cours d’une promenade, sans croiser ces données avec d’autres, génère des données de santé. 

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Qui protège les données de santé ?

Afin de protéger les libertés et droits fondamentaux des personnes, les données et leurs traitements sont strictement encadrés et soumis aux dispositions :

  1. De la Loi Informatique et Libertés (LIL) ;
  2. Du Règlement Européen sur la Protection des Données (RGPD) ;
  3. Du Code de la Santé publique.

La Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) est chargée de surveiler l’application de ces textes.

Big data santé et données de santé : à quoi ça sert ?

Les données de santé : quels intérêts pour les professionnels de santé ?

D’une grande diversité de formats, les données de santé(2) sont : 

  1. Initialement recueillies pour un usage spécifique : diagnostic, détection de mutations, mesure d’une activité physique, etc. 
  2. Exploitées pour faire progresser les connaissances et la recherche. Elles ont, par exemple, permis des avancées dans les domaines de la génétique, le traitement de pathologies cardiovasculaires ou encore du diabète. 
  3. Appariées entre elles grâce à des outils tels que l’intelligence artificielle (IA) pour faire progresser la recherche, les soins et l’innovation en santé. La qualité et la fiabilité des résultats sont renforcées et font surgir des hypothèses et des liens qui n’étaient pas envisagés. 

Données de santé et intelligence artificielle (IA) : quels progrès dans le domaine de la santé ?

L’intelligence artificielle, les techniques de machine learning, la puissance de calcul des ordinateurs, l’explosion quantitative des données numériques mises à disposition (qui a donné naissance au concept de big data santé) et le développement des algorithmes révolutionnent déjà le monde de la santé.

Le développement de l’intelligence artificielle et des différentes technologies vient encore élargir le champ des possibles des professionnels de santé(3)

  • synthèse et modélisation de données complexes pour affiner un diagnostic, identifier des mutations génétiques, détecter précocément et surveiller l’évolution des pathologies (médecine prédictive) ou encore aider à la prise de décisions des médecins(2) ;
  • mise au point de médicaments, dispositifs et traitements mieux ciblés ;
  • émergence de nouvelles hypothèses de recherche.

“ll y a fort à parier que de nouvelles hypothèses de recherche émergeront grâce au « big data» et aux systèmes d’intelligence artificielle.
Pour aller plus loin : IA en santé, une révolution pour votre pratique (replay).”

Bases de données de santé et recherche médicale : quel avenir ?

Le traitement des données de santé permettra probablement : 

  • des avancées dans la connaissance du cancer en intégrant les mutations du génome, les relations hôte/environnement, la capacité d’adaptation du vivant, décomposant ainsi le cancer en sous-ensembles de maladies ; 
  • l’élaboration de politiques de santé publique notamment en améliorant les stratégies de prévention axées sur les risques à destination des différents groupes ciblés ;
  • la conception d’études cliniques stratifiées, réduisant ainsi le nombre de participants et la charge financière et accélérant l’obtention de résultats ;
  • le remplacement de la phase III des essais par des études en vie réelle sur des patients sélectionnés en fonction de leur génétique, de leur phénotype ou encore de leur profil génomique. 

Les coûts de la recherche clinique devraient donc baisser, ce qui impliquerait une évolution du modèle économique de la R&D(2).

L’exploitation des bases de données de santé : quels bénéfices pour les patients ?

La production, la collecte et l’exploitation des bases de données de santé très hétérogènes pourraient permettre de réunir des connaissances pointues sur chaque individu pour : 

  • optimiser la prise en charge ;
  • améliorer les soins, notamment au niveau des lignes thérapeutiques tardives pour lesquelles on dispose de peu de recommandations fondées sur l’“evidence based-medicine“ en raison de la disparité entre les cas(2) ;
  • déterminer les prédispositions à certaines maladies et le profil de risque pour fournir des conseils de prévention ciblés en temps voulu ;
  • dépister précocement des maladies, comme par exemple les risques imminents d’infarctus, et formuler des recommandations sur le comportement à adopter(4) ;
  • personnaliser le diagnostic et réaliser le diagnostic, le suivi et le traitement à distance ;
  • prévenir des situations indésirables en combinant les différentes données provenant de diverses sources pour favoriser la sécurité du patient.

Quels sont les 4 enjeux de la donnée de santé ?

Les mégadonnées de santé ouvrent la voie à une vision holistique de la santé.

Enjeu pour la santé individuelle 

Au niveau de la santé individuelle, les données de santé favoriseraient le passage : 

  • d’une médecine orientée sur la maladie à une médecine orientée sur la santé ; 
  • d’un focus sur la thérapie vers un focus sur la prévention ; 
  • d’un parcours de soins à un parcours de vie ;
  • de conseils de santé à des conseils de mode de vie ; 
  • du rôle de patient à un rôle d’acteur (“actient”), de client ou de « citoyen numérique ». 

Enjeu pour l’industrie pharmaceutique et la recherche médicale

Les mégadonnées de santé, au service de la recherche, conduiraient à : 

  • mieux connaître les maladies et leurs mécanismes sous-jacents pour pouvoir mettre au point des médicaments, des dispositifs et des traitements mieux ciblés ;
  • concevoir des études cliniques stratifiées pour réduire le nombre de participants et les coûts ;
  • obtenir des résultats plus rapidement.

Enjeu pour les politiques de santé publique

En termes de politiques de santé publique, l’enjeu serait notamment d’améliorer les stratégies de prévention axées sur les risques à destination des différents groupes ciblés.

Enjeu pour les organismes de réglementation 

Une meilleure compréhension et maîtrise du processus de conception des études permettraient aux organismes de réglementation de tirer parti d’une amélioration de la pharmacovigilance. Ainsi, lors de la mise à disposition d’un nouveau médicament sur le marché, les données de très nombreux patients pourraient être recueillies et analysées en vie réelle, sur une longue période. 

L’information des patients : un impératif pour le recueil des données de santé

Les personnes dont les données de santé sont collectées disposent de droits, dont le droit d’information et le droit de consultation de données(5) afin de conserver la maîtrise des données les concernant. Il s’agit d’une obligation prévue par le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD). 

Les personnes concernées, patients ou personnes participant à une recherche doivent être informées par les responsables de traitement qu’il s’agisse de professionnels de santé, d’établissements de santé, de services de soins ou encore de fournisseurs de solutions techniques.

L’information doit être délivrée de façon concise, transparente, compréhensible et aisément accessible. 

Le support d’information est libre : par oral, par écrit ou par tout autre moyen (affichage dans les lieux de soins, dans les secrétariats, remise de documents écrits d’information, etc.).

La bonne réponse est :

Les titulaires du pouvoir parentale doivent être informés de l’utilisation de données de santé portant sur l’enfant mineur. Ce dernier doit également  recevoir une information spécifique et adaptée. 5 L’information de la personne  peut être réalisée par voie d’affichage à l’exception des situations pour  lesquelles il existe une obligation légale d’informer la personne concernée  individuellement (par exemple pour la recherche médicale).5 Enfin, il faut  effectivement informer à nouveau une personne dans certains cas de figure :  modification substantielle du traitement, transmission des données de santé du responsable de traitement à un destinataire, utilisation des données de santé  par le responsable de traitement pour une autre finalité, etc.5

Quelles sont les problématiques liées aux données de santé ?

Quelle protection des données de santé collectées dans le cadre du soin ?

En France, les données de santé, données à caractère personnel considérées comme sensibles, collectées dans le cadre du soin bénéficient de protections spécifiques : 

  1. Le secret médical : sauf dérogations expressément prévues par la loi, il couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé. Ce secret s’impose à tous les professionnels intervenant dans le système de santé(6).
  2. Les textes : Règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD), loi Informatique et Libertés, Code de la Santé publique, etc.

Par ailleurs, le règlement général sur la protection des données (RGPD) donne un cadre précis, les modalités et les exigences dans le cadre du recueil et de la protection de ces données(6).

Toutefois, le manque de coordination entre les différentes parties prenantes du secteur de la santé peut entraîner des fuites des données personnelles de santé, par exemple auprès des assureurs ou des employeurs. Il reste donc nécessaire de trouver un équilibre entre partage des informations et respect des données. Enfin, une mauvaise sécurisation des données de santé peut entraîner des fuites et une utilisation de ces données à des fins non médicales(7) avec de potentielles conséquences sur la vie privée des personnes concernées.

Quels problèmes pour l’utilisation des données de santé à des fins non médicales ?

Les données collectées hors du cadre des soins (objets connectés, technologies, etc.) ne font l’objet d’aucune protection particulière, ce qui pose un problème en termes d’éthique et de confidentialité. 

Ces données, recoupées entre elles et avec d’autres sources, permettent : 

  • aux opérateurs de constituer de vastes bases de données dont les finalités entrent dans une logique de marché, une exploitation commerciale des données ;
  • à des entités privées d’obtenir des indications très précises sur l’état de santé des utilisateurs.

Cette problématique est amplifiée par : 

  • le partage de plus en plus fréquent de ces données sur les réseaux sociaux ;
  • le recueil à l’insu des utilisateurs puisque les objets connectés et applications imposent souvent un consentement obligatoire à la collecte de données.

Pour aller plus loin : Enjeux éthiques de l’IA dans la gestion de la crise sanitaire (replay).

Les bonnes réponses sont : A,C

Afin de sécuriser leurs données de santé, les professionnels de santé doivent les protéger contre des accès non autorisés ou illicites et contre la perte, la destruction ou les dégâts d’origine accidentelle. Ils doivent donc mettre en place des mesures de sécurité adaptées (ex : utilisation de la carte dédiée aux professionnels de santé, mot de passe personnel, utilisation d’un système de chiffrement fort en cas d’utilisation d’Internet, etc.).6

Quelques exemples de défis liés aux données de santé :

Quels sont les défis créés par les données de santé ?

Les mégadonnées offrent de nombreuses opportunités d’amélioration de la santé et de la qualité de vie des patients, malades ou non, mais posent de réels problèmes d’ordre technologique, éthique, social et juridique.

Quelques exemples de défis liés aux données de santé :

  • une trop grande rigidité du Règlement général sur la protection des données (RGPD) pourrait ralentir le processus de collecte des données (multiplications des courriers, des déclarations, etc.)(2) ;
  • l’absence de cadre réglementaire ou de système sérieux de vigilance(4) de la qualité des applications mobiles de santé ;
  • des inexactitudes et imprécisions lors de la collecte et de la classification des données avec de potentielles conséquences néfastes à la fois pour le patient et pour la société ;
  • la formation (compétences et savoir-faire) des différentes parties prenantes impliquées dans la collecte et l’analyse des données(4) ;
  • le fossé qui pourrait se creuser entre les différentes générations de professionnels de santé en raison des compétences liées au développement des données de santé. Il est donc crucial d’adapter le système d’éducation à ce nouveau contexte et d’améliorer la formation continue des professionnels de la santé
  • le rôle et les missions des plateformes d’information sanitaire qui stockent et analysent de grands volumes de données(4).

Mégadonnées, santé et éthique : quelles recommandations du CIB ?

Le Comité International de Bioéthique (CIB) considère quatre domaines essentiels dans lesquels des efforts doivent être déployés afin de garantir la protection des droits des individus et de favoriser l’intérêt général : la gouvernance, l’éducation, le renforcement des capacités et le partage des bienfaits.


Définitions

Machine learning : un des domaines de l’intelligence artificielle regroupant des technologies permettant aux ordinateurs d’apprendre sans programme spécifique.

Big data : mégadonnées ou encore données massives qui nécessitent l’utilisation des nouvelles technologies pour leur traitement ainsi que leur stockage en raison de leur volume, vélocité et variété importants.

Evidence-Based Medicine : EBM ou “médecine fondée sur les faits“ est “l’utilisation consciencieuse et judicieuse des meilleures données actuelles de la recherche clinique dans la prise en charge personnalisée de chaque patient” (Sackett D. L.).

Références

(1) CNIL. Qu’est-ce qu’une donnée de santé ?  https://www.cnil.fr/fr/quest-ce-ce-quune-donnee-de-sante

(2) Leem. Santé 2030 une analyse prospective de l’innovation en santé. Edition 2020. https://www.leem.org/sites/default/files/2019-12/LEEM_Plateforme_Sante2030_FR_EXE_Nov2019.pdf. https://www.leem.org/publication/sante-2030-une-analyse-prospective-de-linnovation-en-sante

(3) Comité international de bioéthique. Rapport du CIB sur les mégadonnées et la santé. Septembre 2017 https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000248724_fre

(4) CNIL. Traitement de données de santé : comment informer les personnes concernées ? https://www.cnil.fr/fr/traitement-de-donnees-de-sante-comment-informer-les-personnes-concernees

(5) Conseil national de l’ordre des médecins. Protéger les données de santé. https://www.conseil-national.medecin.fr/medecin/devoirs-droits/proteger-donnees-sante

(6) Adecco Medical. Livre blanc informatif. Santé numérique : quelles (r)évolutions pour demain ?

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