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Les progrès attendus en médecine régénérative


La médecine régénérative est une des approches thérapeutiques les plus prometteuses du 21e siècle et porteuse d’espoirs. Cette branche de la médecine vise à développer des méthodes permettant de réparer, remplacer, voire faire repousser des cellules, des tissus ou encore des organes1. L’une des branches actuelles est la transplantation d’organe à partir de donneur. Cependant, cette technique reste limitée, en raison notamment du faible nombre d’organes disponibles2.

La compatibilité entre donneur et receveur peut également poser problème2. Ces limitations pourraient être surpassées grâce aux progrès de la médecine régénérative basée sur la production et l’utilisation de cellules souches thérapeutiques (moelle osseuse, cellules ips, cellules foetales…), l’ingénierie de tissus (tissu cardiaque…) ou encore la production d’organes artificiels.

Cependant, de nombreux obstacles viennent entraver le succès de la médecine régénérative et le chemin vers une utilisation de masse est encore long.

Thérapie cellulaire et thérapie génique dans le cadre de la médecine régénérative

La thérapie cellulaire est une procédure médicale consistant à transplanter des cellules à un patient3. Elle est souvent associée et complétée par la thérapie génique qui a pour but de corriger les défauts génétiques dans un type cellulaire donné, soit pour restaurer une fonction défectueuse, soit pour en apporter une nouvelle3.

La bonne réponse est : B

Il n’y a pas de différence entre médecine régénérative et médecine régénératrice. Les deux termes peuvent être employés pour parler de ce type de médecine.

La thérapie cellulaire en médecine régénératrice

Quel est le but de la thérapie cellulaire ?

La thérapie cellulaire fait principalement intervenir des cellules progénitrices qui peuvent être reprogrammées en cellules différenciées. Ces cellules reprogrammées sont ensuite transplantées aux patients au niveau des organes altérés ou défectueux pour les rendre de nouveau fonctionnels. Il existe aujourd’hui trois types principaux de cellules souches utilisées en médecine régénérative :

Les ESC, entre espoir et dilemme éthique

Les ESC sont des cellules souches pluripotentes retrouvées dans la masse cellulaire intérieure des embryons au stade blastocyste. Elles ont la capacité de se multiplier à l’infini et de se différencier en différents types de cellules adultes. Cependant, leur utilisation reste limitée, d’une part parce qu’elles peuvent potentiellement former des tumeurs lorsqu’elles sont transplantées (dû à une efficacité de différenciation qui n’est pas de 100%), et en raison du risque de rejet immunologique (dû aux problèmes de compatibilité immunologique)2,3.Par ailleurs, l’utilisation d’embryons humains pose des dilemmes éthiques2,3. Enfin, ces cellules ne sont retrouvées qu’en quantité limitée dans les blastocystes.

Toutefois, de nombreux essais cliniques basés sur les ESC sont en cours, notamment pour le traitement de la DMLA (Dégénérescence Maculaire Liée à l’Age) ou delà dystrophie maculaire de Stargart. L’idée est de différencier les ESC en cellules de la rétine pour les injecter aux patients afin qu’ils recouvrent leurs fonctions visuelles4. D’autres domaines font également intervenir des ESC, tels que la cardiologie pour pallier une pathologie du type insuffisance cardiaque. Les ESC sont également une piste pour le traitement du diabète de type 1 en différenciant des ESC en cellules pancréatiques productrices d’insuline4.

Les IPSC, pour une médecine régénératrice à grande échelle ?

Les IPSC, sont plus prometteuses. Elles se comportent de manière très similaire aux ESC mais contrairement à ces dernières, elles peuvent être produites en quantité illimitée, ce qui leur confère un potentiel énorme pour la médecine régénérative5. Les IPSC sont obtenues par reprogrammation génétique de cellules adultes différenciées provenant de différents tissus de l’organisme5.Elles ont également l’avantage de pouvoir être issues du patient lui-même et d’être donc utilisées dans le cadre de transplantations autologues3.

Par ailleurs, bien que les IPSC ne pallient pas les risques de développement de tumeur, elles permettent de résoudre le problème de compatibilité immunologique3. En effet, une utilisation hétérologue dans le cadre de transplantations allogéniques est en cours de développement grâce notamment à la création de banque d’IPSC HLA-spécifique qu’il sera possible de modifier génétiquement par thérapie génique pour répondre à un défaut de fonction cellulaire ou d’un organe3.

Actuellement, les essais cliniques sur les IPSC sont encore limités car la reprogrammation peut induire des défauts génétiques difficiles à détecter5. Néanmoins, certains essais cliniques en sont au stade précoce, notamment sur les maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson (transplantation de cellules dopaminergiques dérivées d’IPSC) ou encore sur l’insuffisance cardiaque (transplantation de cardiomyocytes fonctionnels pouvant induire des facteurs de régénération tissulaire)5.

La bonne réponse est : B

Les premières cellules mères pluripotentes induites ont été générées par reprogrammation de fibroblastes adultes en 2006 par le Japonais Shinya Yamanaka qui recevra le prix Nobel de médecine pour cette découverte en 2012.6

Les MSC : l’avenir de la médecine régénérative?

A la différence des ESC et des IPSC, les cellules souches mésenchymateuses sont des cellules multipotentes pouvant se différencier en un nombre limité de types cellulaires (4).Elles peuvent se différencier en cellules cartilagineuses, osseuses, graisseuses, musculaires… Un des avantages des MSC est la facilité de prélèvement. En effet, elles sont retrouvées dans tout l’organisme comme dans le tissu adipeux, la moelle osseuse, les os ou encore les muscles. De ce fait, elles sont régulièrement utilisées dans le cadre de greffes autologues. Par ailleurs, ces cellules expriment faiblement les marqueurs de compatibilité immunologique (HLA) et sécrètent des facteurs anti-inflammatoires qui entrainent une immunosuppression locale, protégeant ainsi du rejet de greffe. Il est donc également possible de les utiliser pour des transplantations allogènes.4

Ainsi, plus de 350 essais cliniques de thérapie cellulaire utilisant les MSC sont en cours dans le monde. Dans l’optique de la médecine régénérative, les résultats de certains essais seront intéressants. Notamment, en ce qui concerne le rejet de greffe, la dégénérescence musculaire ou la cardiologie4. Mais également pour l’arthrose (différenciation des MSC en cellules cartilagineuses) (7), ou encore la polyarthrite rhumatoïde (régulation de l’inflammation au niveau des articulations)8.

Un nouveau type cellulaire : les cellules trans-différenciées

En plus des progéniteurs, des études sont en cours pour générer des cellules différenciées spécifiques d’organes à partir de différents types de cellules somatiques. Ce type de procédure, que l’on appelle trans-différenciation, permet d’outrepasser le stade pluripotent des cellules souches (à l’origine du risque de formation de tumeur). Bien que les recherches soient préliminaires, ce processus, semble plus sûr pour les patients. Toutefois, des études complémentaires sont nécessaires pour déterminer si ces cellules «converties» sont complètement fonctionnelles3.

La thérapie génique en médecine régénérative

La thérapie génique consiste à modifier un gène dans une cellule soit en apportant un gène suppléant, soit en éliminant ou réparant un gène altéré à l’aide de techniques d’édition génomique dans la cellule (nucléase à doigt de Zinc, TALEN ou CRISPR)9. L’une des difficultés est d’apporter des acides nucléiques à l’intérieur de la cellule car ceux-ci n’ont pas la capacité de traverser la membrane plasmique cellulaire3.

Les bonnes réponses sont : A, B et D

Il est possible de modifier le profil génétique de cellules en médecine régénérative à l’aide de virus modifiés renfermant les acides nucléiques d’intérêt appelé vecteurs viraux. Ils sont basés sur la capacité naturelle des virus à entrer dans les cellules afin d’y libérer leur génome. Il existe deux types des vecteurs viraux : non-intégratifs (basés sur les Adénovirus, induisant une modification transitoire) et intégratifs (basés sur les rétrovirus, qui ont la capacité d’intégrer leur génome dans celui de la cellule hôte, induisant une modification permanente). De plus, il est possible d’apporter un acide nucléique dans la cellule par électroporation (ouverture de la membrane plasmique par choc électrique), ou par l’utilisation de liposome (vésicule formée de lipide renfermant l’acide nucléique)3

En médecine régénérative, la thérapie génique va donc consister à modifier génétiquement les cellules ex-vivo avant de les transplanter au patient. Pour ce faire, une nouvelle génération de nanoparticules, permettant de transfecter des cellules de manière plus efficace et plus sûre que les autres vecteurs, est actuellement en phase préclinique3.

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Ingénierie de tissus et Bio-impression 3D

L’un des objectifs delà médecine régénérative est de pouvoir reconstruire partiellement ou totalement un organe sans l’intervention d’un donneur. En ce sens, la bio ingénierie tissulaire apporte une solution. Elle permet d’obtenir un tissu in-vitro qui va ensuite être greffé au patient. La plupart du temps, la création du tissu nécessite un échafaudage naturel composé de biomatériaux. Les biomatériaux fournissent en effet une structure qui facilite l’organisation des cellules et leurs interactions, en faveur de la création ou de la régénération du tissu10.

La bonne réponse est : A

La technique de décellularisation est une technique qui vise à éliminer les cellules d’un tissu ou d’un organe d’un donneur, par différents traitements (physique, chimique, enzymatique), pour en garder seulement la matrice extracellulaire. Cette matrice extracellulaire servira ensuite d’échafaudage pour la création d’un nouveau tissu ou organe fonctionnel à l’aide de cellules progénitrices ou de cellules souches, issues du receveur, et différenciées en cellules d’intérêt. Une telle matrice, même provenant d’un donneur, n’est pas immunogène et ne pose pas de problème de compatibilité. Cette technique est déjà utilisée pour la greffe de peau, greffe de tissus cardiaques ou encore la reconstruction osseuse2.

La bio-impression 3D, c’est-à-dire l’impression de tissus en structures tridimensionnelles grâce à une «encre» biologique contenant des cellules (différenciées ou non) est une stratégie alternative de la bio ingénierie tissulaire10. Elle a pour objectif de générer des organes et permet une automatisation des processus de fabrication, une reproductibilité fiable et une production de masse. Bien que l’impression 3D soit déjà utilisée dans des processus acellulaires pour la chirurgie orthopédique et les réparationsmaxillo-faciales2, de gros progrès sont attendus pour la reconstruction d’organe entier. Actuellement, des études précliniques de transplantation de tissus osseux et de cartilage sont en cours sur des animaux. Cependant, de nombreux obstacles restent à surmonter, notamment du fait de la taille et de la complexité des organes à synthétiser 2.

Les enjeux futurs de la médecine régénérative

Afin de se développer pleinement, la médecine régénérative doit surmonter de nombreux défis techniques et scientifiques. Par ailleurs, son essor risque d’être freiné par la règlementation et l’environnement économique. En 2017, une commission d’expert britannique a résumé dans le journal The Lancet les avancées de la recherche en médecines régénératives et a décrit les enjeux auxquels il faudra répondre dans le futur3,11.

Cette commission recommande de bâtir quatre piliers sur lesquels devront reposer la médecine régénérative11:

  1. une recherche scientifique plus exigeante, notamment lors des essais précliniques sur l’animal pour mieux juger la possibilité d’aller plus loin32.
  2. de meilleurs modèles de financement, avec une priorité donnée sur l’amélioration du rapport coût/efficacité afin de permettre une production à grande échelle33.
  3. un paysage réglementaire mieux défini, prenant en compte les limiteséthiques114.
  4. un engagement accru de tous les acteurs : autorités de santé, chercheurs, professionnels de santé, patients et grand public11

Définitions

Médecine regénérative : ou “médecine régénératrice” a pour but de réparer des lésions en régénérant les zones endommagées par la transplantation de nouveau tissu cellulaire.

Thérapie cellulaire : Dans le cadre de la « thérapie biologique », la thérapie cellulaire vise à traiter un organe ou un organisme en apportant des cellules, la plupart du temps issues de cellules souches, pour remplacer ou reconstituer les cellules épuisées.

Thérapie génique : thérapie permettant d’ajouter des gènes dans les tissus ou les cellules d’un patient pour guérir une pathologie.


(1) Nature Portfolio –Regenerative Medecine Accessible sur: https://www.nature.com/subjects/regenerative-medicine Consulté le: 17/11/20212.
(2) Edgar L, Pu T, Porter B, Aziz JM, La Pointe C, Asthana A, Orlando G. Regenerative medicine, organbioengineering and transplantation. Br J Surg. 2020 Jun;107(7):793-800. doi: 10.1002/bjs.11686.PMID: 32463143.
(3) Cossu G, Birchall M, Brown T, De Coppi P, Culme-Seymour E, Gibbon S, Hitchcock J, Mason C,Montgomery J, Morris S, Muntoni F, Napier D, Owji N, Prasad A, Round J, Saprai P, Stilgoe J, ThrasherA, Wilson J. Lancet Commission: Stem cells and regenerative medicine. Lancet. 2018 Mar3;391(10123):883-910. doi: 10.1016/S0140-6736(17)31366-1. Epub 2017 Oct 4. Erratum in: Lancet.2018 Mar 10;391(10124):e8. PMID: 28987452.
(4) Inserm, La science pour la santé –Thérapie Cellulaire: Greffer des cellules souches pour soigner durablement Accessible sur: https://www.inserm.fr/dossier/therapie-cellulaire Consulté le: 16/11/2021
(5) Inserm, La science pour la santé –Cellules souches pluripotentes induites (IPS): un outil formidable pour la recherche… qui va révolutionner les nouvelles thérapies Accessible sur: https://www.inserm.fr/dossier/cellules-souches-pluripotentes-induites-ips/ Consulté le: 16/11/2021
(6) Takahashi K, Yamanaka S. Induction of pluripotent stem cells from mouse embryonic and adultfibroblast cultures by defined factors. Cell. 2006 Aug 25;126(4):663-76. doi:10.1016/j.cell.2006.07.024. Epub 2006 Aug 10. PMID: 16904174.
(7) Inserm, La science pour la santé –Arthrose: la maladie articulaire la plus répandue Accessible sur: https://www.inserm.fr/dossier/arthrose Consulté le: 24/11/2021
(8) Inserm, La science pour la santé –Polyarthrite rhumatoïde: une maladie modèle pour la recherche sur l’inflammation chronique Accessible sur: https://www.inserm.fr/dossier/polyarthrite-rhumatoide Consulté le: 24/11/2021
(9) Inserm, La science pour la santé –Thérapie génique: une recherche de longue haleine qui porte ses fruits Accessible sur: https://www.inserm.fr/dossier/therapie-genique Consulté le: 17/11/2021
(10) Inserm, La science pour la santé –Biomatériaux: l’ingénierie tissulaire au secours du corps humain Accessible sur: https://www.inserm.fr/dossier/biomateriaux/ Consulté le: 16/11/2021
(11) LEEM –Médecine régénérative: quelles avancées à ce jour ? Accessible sur: https://www.leem.org/100-questions/medecine-regeneratrice-quelles-avancees-ce-jour Consulté le: 16/11/2021